Notre humanité ne se résume pas à la foi
Cette tribune est par dans le supplément de Témoignage Chrétien n° 3611 de novembre 2014
Pour une présentation du dossier : http://temoignagechretien.fr/
Le monde n’est ni bon ni mauvais en soi, il n’est tout simplement rien d’autre que ce que les Hommes en font, et notre futur sera à l’image de ce que nous lui préparons aujourd’hui. Pour relever ce défi, les croyants doivent affirmer clairement leur parti-pris humaniste et spirituel pour concourir à définir les contours d’une société dans laquelle chaque individu, au-delà de toute forme d’appartenance convictionnelle, doit pouvoir réaliser la plénitude de sa condition d’Homme. Ce rappel n’est pas la énième forme d’un quelconque vœu pieu, c’est à la fois la nécessité et la condition sine qua non de la pérennité de notre vivre-ensemble. Il procède d’une approche inclusive du monde et du combat contre toute forme de repli sur un quelconque entre-soi exclusif des autres. Aussi, il est assez inquiétant de voir des croyants de toutes confessions réduire leur appartenance religieuse à une enveloppe identitaire censée les distinguer du reste des Hommes qui seraient foncièrement corrompus et voués aux gémonies. Cette vision procède d’une théologie de l’exclusivité et de l’exclusion qui est doublement problématique : elle prétend tout d’abord définir des degrés d’humanité sur fond d’appartenance confessionnelle comme si Dieu aurait posé, dès la création d’Adam, une humanité à plusieurs étages. Elle pousse ensuite vers un isolement psychique et physique du croyant qui en vient à renier l’essence même de sa fonction ; être un témoin au cœur du monde et devant les Hommes de la foi qu’il porte. Ces croyants ont oublié une chose essentielle : les sources scripturaires des traditions religieuses nous interrogent sur le fondement de notre humanité et sur notre capacité à faire société, avant même de nous distinguer sur la base d’une quelconque appartenance convictionnelle. Cette vision du monde est vouée à péricliter, mais avant de disparaître combien de vies aura-t-elle encore sacrifiées ? C’est aux croyants d’en décider et de choisir leur destinée à la lumière d’une théologie inclusive et émancipatrice. Celle-ci procède d’un paradigme fondamental : la révélation, qu’elle qu’en soit sa forme, constitue avant toute chose un point de départ, un horizon sans cesse renouvelé qui offre à l’Homme les moyens de penser et et de réaliser les conditions de sa perfectibilité. Dans cette perspective, aucun individu ni aucun groupe replié du monde ne peut remplir la fonction du témoignage ni assurer les conditions de son élévation spirituelle. Cette théologie inclusive et émancipatrice considère que Dieu a posé deux paramètres fondamentaux pour la vie collective sur terre, ce sont l’unité et la diversité des Hommes. Du point de vue de l’unité, chaque individu, pris dans sa subjectivité, est à la fois l’incarnation de la métaphore du divin comme il est représentatif de la pleine condition humaine, au-delà d’une croyance et d’un comportement spécifiques. Du point de vue de la diversité, il faut considérer la pluralité des croyances et des sociétés humaines comme procédant de la volonté de Dieu, sauf erreur manifeste de sa part. Les croyants qui cherchent à reproduire un modèle d’entre-soi qui n’a jamais existé et qui n’existera jamais sont en train de passer à côté de leur véritable fonction. Ils auront tout à gagner à développer un témoignage de la Foi qui considère la fraternité en humanité comme le véritable horizon collectif à atteindre.