La Plume 2012-2014

L’islam appartient-il aux musulmans ?

Tribune parue dans La Plume de l’Est de janvier 2014, A qui appartient l’islam ?

Allah n’est pas le Dieu des musulmans, et encore moins celui des Arabes. Pour les fidèles de l’islam, il est le créateur de l’univers, doté des plus nobles attributs, et sa miséricorde touche l’ensemble de la création, au delà de la planète terre et des croyants qui la composent. Pour comprendre Dieu, son immensité et ses attributs, les musulmans ont puisé à la source coranique, aux propos prophétiques ; par la suite, ils n’ont pas hésité à introduire dans leur réflexion théologique les éléments des philosophies grecque et romaine, de même qu’ils se sont confronté aux différentes doctrines religieuses qui ont préexisté à l’islam et ont perduré tout au long des empires musulmans d’Orient et d’Occident. Cela a conduit les plus hautes autorités de l’islam à diverger sur à peu près toutes les questions d’ordre théologique et juridique. Nous avons ainsi pas moins de trois écoles de théologie reconnues comme orthodoxes (l’école hanbalite, l’école hanafite-maturidite et l’école acharite, de loin la plus répandue de par le monde musulman). De même, les contrées musulmanes ont vu se développer une bonne vingtaine de doctrines juridiques, dont on en retient généralement quatre principales, à savoir le hanafisme, le malékisme, le chaféisme et la hanbalisme. Ces quatre écoles ont elles-même connu autant de ramifications que d’aires culturelles musulmanes, puisque la culture, ou coutume, a été intégrée comme l’une des sources des fondements du droit canon musulman.

L’islam procède donc à la fois d’une communauté de foi, unie dans la croyance en un Dieu unique ; mais diversifiée quant à son interprétation et aux modalités concrètes d’accomplissement des rites, voire même de compréhension de l’univers. Cette divergence des doctrines musulmanes, quelle soit revendiquée ou condamnée par les théologiens musulmans, est une réalité depuis l’époque prophétique jusqu’à nos jours. Les plus hautes sommités de l’islam ont toujours divergé sur les questions fondamentales comme sur les questions subsidiaires de la croyance et de la pratique cultuelle. On rapporte ainsi les interprétations divergentes sur Dieu, sur ses attributs, sur la possibilité ou non pour l’Homme d’agir sur le destin, sur le caractère éternel ou non du châtiment dans l’au-delà, etc. Au plan du droit canon musulman, les divergences d’interprétations des textes sont tellement nombreuses qu’il est difficile de parler d’un droit musulman unifié, tant les divergences méthodologiques, doctrinales et dans l’application concrète du droit sont extrêmement nombreuses.

Malgré cela, trop de musulmans usent et abusent, aujourd’hui, du langage de la vérité absolue, comme s’il ne pouvait exister qu’une seule interprétation musulmane de Dieu, du monde et de la façon de pratiquer l’islam. Signe d’une décadence profonde de la pensée critique, ils rompent avec la tradition interprétative des textes en avançant comme principaux arguments l’autorité des anciens savants et un soi-disant consensus qui ne devrait pas être rompu. Plus d’un savant, parmi nos pieux prédécesseurs, se retournerait dans sa tombe face à cette bigoterie doublée d’une incapacité, dont font preuve trop de diffuseurs de discours, à se penser dans le monde contemporain.

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